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Le sillon, une marche en fraternité
16 octobre 2015

Via ARVERNA

...mène à la taverna !

JOUR 39 : vendredi 16 octobre
ISSOIRE au Breuil-sur-Couze (63):19 km

Je quitte Issoire assez tard non sans avoir longuement visité l'abbatiale Saint Austremoine où il est écrit à l'entrée que "sa beauté et son harmonie peuvent élever l'âme et la pensée des hommes." Ce n'est pas moi qui contredirai cette phrase...
Je me mets en quête des balises de la via arverna, chemin qui relie Clermont-Ferrand à Cahors et qui se jette dans la via podiensis, pèlerinage du Puy-en-Velay vers Compostelle. Les balises sont bleu nuit avec une coquille St Jacques stylisée jaune et sont beaucoup moins visibles que les deux traits parallèles rouge et blanc des sentiers de grande randonnée (GR). J'ai des difficultés à trouver mon chemin et le perds souvent, d'autant que certaines balises ont été arrachées par des personnes indélicates.
Dans la forêt je rencontre une charmante dame qui se promène en ramassant des noix et qui engage aussitôt la conversation. Bernadette m'a reconnue après avoir lu l'article sur la Montagne. Moi qui suis très physionomiste et qui reconnais les gens plusieurs décennies après les avoir rencontrés, je suis un peu désarçonnée d'être identifiée par une inconnue. Je sens que ma démarche la touche et je suis touchée en retour par la qualité de son écoute et sa bienveillance. Nous échangeons des choses personnelles très vite, debout sur notre chemin, le coeur mutuellement réchauffé l'une par l'autre. Je repars tout émue et chargée des noix que Bernadette me fourre dans les poches du sac, malgré mes protestations.
La journée semble placée sous le signe de la beauté et je m'en réjouis.

Je remarque dans un champ le ballet de deux engins agricoles qui se mettent au diapason pour travailler ensemble. L'un des véhicules fauche et projette l'herbe dans la remorque du second véhicule. Ils doivent tous deux caler leur rythme de progression sur l'autre, sous peine de perdre le fruit de leur travail. J'y vois une métaphore de ce qu'est la communication entre les humains et les observe longuement se prêter main-forte.

Je tombe en admiration ( quelle ineptie, on devrait dire s'élever en admiration et s'élever en amour plutôt que tomber) devant le petit village du Broc, perché sur une colline et jouissant d'une très belle vue sur les environs. C'est là que je décide, ayant à nouveau perdu mon chemin, de me rendre sur le piton rocheux qui fait face au Broc. Peu importe s'il n'est pas sur ma route, cet endroit m'attire et je veux y aller.
Il ne paraît pas si loin, mais l'Allier est un obstacle que je ne peux franchir qu'en suivant ses boucles sinueuses. La nuit tombe presque quand j'arrive au Breuil-sur-Couze,où il me faut donc demander l'hospitalité. Comme à mon habitude, je cherche conseil dans les commerces de proximité, à l'épicerie d'abord, puis au café-bureau de tabac. En poussant la porte de CAF & CLOPES, je me sens rassérénée, captant aussitôt l'ambiance chaleureuse qui y règne. Effectivement, il y a là une bande d'habitués qui se retrouvent quotidiennement au café de Jérôme pour l'apéro, et certains aussi le matin pour le café.
Un verre m'est offert (ici, chacun paie sa tournée) et je fais connaissance de la joyeuse troupe. Outre le patron, il y a Isabelle, Fabrice, Sarah, Alain, Marie et quelques autres personnes dont je n'ai pas retenu le nom.Ils sont trois à proposer de m'héberger, j'irai chez Fabrice, le premier à m'avoir invitée. Je me laisse aller à la légèreté et à la gaîté de l'ambiance. C'est bon, c'est doux, ça réchauffe. A 45 ans, je suis peu familière de la vie de groupe, j'ignore ce qu'est une bande de copains. Je leur suis reconnaissante de m'intégrer avec autant de simplicité. Isabelle nous invite à manger chez elle, mais avant Sarah me propose d'aller avec elle et Fabrice nourrir ses chevaux. C'est avec plaisir ( et un reliquat d'appréhension) que je donne à manger à Balou, le vieux cheval aux cuissots tout doux. Je ne me risque pas à approcher Attila, jeune étalon fougueux que Sarah dompte avec une maîtrise qui m'impressionne pour son jeune âge. Elle s'est tatoué le nom des deux bêtes sur les poignets.
Moi : Mais, ils ne sont pas éternels tes chevaux !
Sarah: Ben justement!
Je suis touchée par cet amour qu'elle manifeste pudiquement pour les animaux, de même que Fabrice qui dit que "les animaux sont ses copains", qu'ils recherchent sa présence. Je suis admirative de cette capacité à entrer en lien, en intimité avec les bêtes. Je n'ai pas développé cette aptitude-là et cela me chagrine un peu.
Nous rejoignons Alain et Isabelle pour le repas. Celui-ci est extrêmement sympathique, joyeux et détendu. Aucune envie d'orienter la discussion sur les valeurs de la République. Il me suffit de les regarder vivre, être ensemble pour constater que la fraternité est ici vécue au quotidien et n'a nul besoin d'être pensée. Isabelle me raconte les coups de main donnés sans compter par Fabrice, la générosité de Jérôme le cafetier qui a moult attentions pour ses clients (" A Noël, on a nos huîtres et notre verre de vin blanc").Je sais que telle personne a accueilli telle autre dans un moment difficile, le réseau de solidarité est réel, ils se serrent les coudes et se tiennent chaud en cas de coups durs. Fabrice me redit qu'il n'allait pas me laisser dehors, qu'il sait ce que c'est que d'être dans la rue.
Je leur suis reconnaissante de m'avoir fait une petite place dans leur bande.
Simplement. Généreusement. Avec le coeur.
Toi l'étranger, si tu passes par le Breuil-sur-Couze, arrête-toi au café et va t'y réchauffer.

 

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Commentaires
L
Me voilà rassuré Evelaine .... au cours de mes longues marche en solitaire en France , en Espagne, en Italie ,,, le seul endroit ou l'on m’ait refusé de l'eau c'est en Auvergne et pourtant cette chanson de Brassens ... , m...de alors !!<br /> <br /> Merci mon pays, ouvrez votre porte à Evelaine, ouvrez votre coeur, partagez .... Merci
S
Belle, belle... Comme le jour.<br /> <br /> ....
C
"(...)le cœur mutuellement réchauffé l'une par l'autre." C'est joli, ça! Et en plus ça réchauffe le cœur de le lire. Christine D.
S
Taverne miraculeuse! c'est toi qui les inventes ces lieux chaleureux ??<br /> <br /> Bravo Evelaine, tu sais les voir...les trouver<br /> <br /> Tous à Breuil-sur-Couze à CAF & CLOPES!!
Le sillon, une marche en fraternité
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